Dans cette décision relative à la taxe sur la valeur ajoutée, le Conseil d'Etat posait déjà le principe remis à l’honneur par la décision Sylvain Joyeux en matière d’imposition sur les bénéfices, et qui avait été abandonné un moment par la Section du Contentieux avec sa décision de 2003 « Etablissements Lebreton ».
« En vertu des dispositions combinées des articles 272-2 et 283-4 du code général des impôts et de l'article 223-1 de l'annexe II à ce code, un contribuable n'est pas en droit de déduire de la taxe sur la valeur ajoutée dont il est redevable à raison de ses propres opérations la taxe mentionnée sur une facture établie à son nom par une personne qui ne lui a fourni aucune marchandise ou prestation de services ou qui n'était pas le fournisseur réel de la marchandise ou de la prestation effectivement livrée ou exécutée.
- Dans le cas où l'auteur de la facture était régulièrement inscrit au registre du commerce et des sociétés et se présentait à ses clients comme assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée, sans qu'il soit manifeste qu'il n'aurait pas rempli les obligations l'autorisant à faire figurer cette taxe sur ses factures, il appartient à l'administration, si elle entend refuser à celui qui a reçu la facture le droit de déduire la taxe qui y était mentionnée, d'établir qu'il s'agissait d'une facture fictive ou d'une facture de complaisance ; que, par suite, la cour administrative d'appel de Paris n'a pu, sans méconnaître cette règle, juger qu'il incombait à la SARL DIVA, qui exploitait à Paris une entreprise de fabrication de vêtements féminins, d'établir la réalité des prestations de services qui lui avaient été facturées par la société SMR, sans avoir recherché, après qu'elle eût cependant relevé que celle-ci était régulièrement inscrite au registre du commerce et des sociétés et qu'elle se présentait comme assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée, s'il n'était pas manifeste qu'elle n'aurait pas rempli les obligations l'autorisant à faire figurer la taxe sur la valeur ajoutée sur ses factures.
- Dans le cas où une entreprise, à laquelle il appartient toujours de justifier, tant du montant de ses charges que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité, justifie d'une charge comptabilisée par une facture émanant d'un fournisseur, il incombe à l'administration, si elle entend refuser la déduction de cette charge, d'établir que la marchandise ou la prestation de services facturée n'a pas été réellement livrée ou exécutée.
Par suite, la cour administrative d'appel de Paris n'a pu, sans méconnaître aussi cette règle, juger qu'il appartenait à la SARL DIVA de prouver que les prestations de services qui lui ont été facturées par la société SMR avaient été réellement exécutées, sans avoir préalablement examiné les éléments invoqués par l'administration pour contester la réalité de cette exécution ».
Est ici mis en œuvre ce qu’il est convenu d’appeler un système ternaire d’administration de la preuve, la première phase incombant au contribuable (régularité dans son principe et dans son montant de l’inscription en comptabilité), la deuxième à l’administration (mise en avant d’éléments permettant de douter de la réalité de la prestation) et enfin à nouveau au contribuable (confirmation de cette réalité de la prestation, en dépit des éléments mis en avant par l’administration).
Conseil d’Etat 18 septembre 1998 N° 149341 (texte intégral ici).
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